Le péteux

On se donne rendez vous pour prendre un verre dans un endroit sympatoche, il arrive à l'heure, on discute quelques minutes à peine, on n'a pas encore commandé, il me dit très calmement qu'il est en manque d'affection avec un petit clin d'oeil. Il est pas mal mais ce n'est pas une gravure de mode et je suis fatiguée de ce mode d'accroche, aussi. Je réponds sur le même ton, ah bon, moi, ça va, merci. 

Là, j'ai surtout envie de papoter, j'aime bien connaître un peu les gens et je ne suis pas du genre à leur sauter dessus dans les ruelles sombres si je ne les ai pas déjà fréquentés un chouia. 

 Le crétin me toise, comme un morceau de viande à l'étalage et me dit d'un air qu'il veut méprisant que ça va pas le faire. 

Ah ouais, ça va pas le faire ? Diantre, je devrais probablement sortir mon mouchoir et me rouler par terre, faire un beau caprice, ou bien lui mettre mon poing dans sa petite gueule de péteux, pour voir. Mais ce serait trop d'honneur pour un petit naze, je me contente de lui souhaiter, en souriant, une bonne vie de connard, et je pars la tête haute, et l'honneur sauf. 

Durée du rendez vous : douze minutes, trente trois secondes.

Ma bouillotte et un livre plus tard, je m'endors tranquillement au fond de mon lit douillet, où je dors en étoile avec délectation.